Madeleine Sins


<deeply>
“peintures”

du 15 mars au 2 avril 2016

Vernissage le jeudi 17 mars

à partir de 18h

Nocturne vendredi 25 mars et soirée de clôture samedi 2 avril / 16h-22h

Mémoire et Oubli

Et si la création était dans l’intervalle entre la mémoire et l’oubli ?

« Alors c’est bon ? Je suis artiste ? Je suis inscrite à la maison des artistes, j’ai vendu des toiles, j’ai déclaré
ces revenus et payé des charges. » Voici ce que la déesse Mnémosyne ne doit pas trop me rappeler.
Quand Mnémosyne – depuis les hauteurs intimidantes de l’Olympe antique – me dit que je suis une artiste,
l’Histoire de l’Art pointe son nez et mon œuvre s’empèse.

L’oubli est mon idéal de peintre. Oublier l’encombrant statut d’artiste, sa fonction sociale, son autorité ;
ne pas ressusciter les œuvres que j’ai aimées, ni créer de la valeur, ne pas consulter mes angoisses. Mais
se laisser aller à faire du neuf, si étranger qu’il puisse être à moi-même. Cela, c’est quand tout se passe bien.

Je cherche l’oubli (de moi-même, de mes intentions) pour peindre mais je n’y parviens pas sans errements.
Au début d’un travail artistique, j’espère une inspiration : autant l’avouer. Alors, je fouille ma mémoire
encombrée, j’y trouve parfois un sujet. Mais je le défigure si bien qu’il n’existe plus au bout de quelques instants.

Les tableaux que je garde ont échappé à des forces intérieures : à celle qui ressemble à l’Artiste soucieux de
faire l’artiste ou à celui qui ne veut rien déranger. Ce dernier n’est pas le plus dangereux si on l’arrête à temps.
Il arrive après que l’œuvre a été peinte. C’est l’artiste sourcilleux, toujours prêt à saccager ce qu’il ne reconnaît pas.

Mes tableaux, je les garde quand je ne discerne même plus mes intentions premières. Si par malheur mes intentions s’agitent encore, avec leurs lourdes références, c’est que j’ai manqué d’oublier mon but : de faire du neuf, de laisser  les couleurs et les formes se faire. Ne pas même viser l’inachèvement, puisque il est, comme le regret, inévitable.
Il faudrait parvenir à une œuvre où le travail ne se voit pas, où le désir l’a confondu. Ma peinture, quand je l’aime, c’est de la pop music.

Un remède à la tristesse qui n’est pas la joie.

Oublier pour trouver/retrouver une première intention, une évidence, une image oubliée, à peine une sensation. Je trouve mes semblables dans les empreintes des grottes rupestres plutôt qu’à Florence.

                                                                                                                                   Sébastien de Flers, Madeleine Sins
                                                                                                                                   Conversation (Elle parle, il écrit)